Avis #28 : Le froid modifie la trajectoire des poissons - Pierre Szalowski

Premier livre que je présente dans le cadre du hashtag #juilletjevoyageenlivres de @riendetelque, Le froid modifie la trajectoire des poissons, le premier roman de Pierre Szalowski, pourrait être la solution idéale pour se rafraîchir en cas de canicule puisque son action prend place pendant une tempête de verglas sans précédent. Il peut également être une lecture hivernale particulièrement efficace : je ne doute pas une seule seconde que ce roman saura vous réchauffer le coeur.

Le narrateur qui nous livre son histoire est un garçon montréalais de onze ans qui apprend, au début de l'année 1998 alors que les fêtes sont à peine terminées, que ses parents ont décidé de se séparer. L'enfant, dont on ne connaîtra jamais le nom pour que « [son] histoire puisse appartenir à tous les enfants qui voudraient se faire entendre », implore alors le ciel de lui venir en aide. Le lendemain débute une période de cinq jours au cours desquels vont tomber de fortes pluies verglaçantes qui vont paralyser une partie du Québec. Réponse favorable du ciel ou simple caprice météorologique, cette période de grand gel (qui a réellement eu lieu) est sur le point de changer la vie de plusieurs habitant·e·s de la rue en les amenant à se découvrir les un·e·s les autres et à s'entraider. Pourtant, ce verglas, duquel le jeune narrateur est persuadé être à l'origine, semble enclin à régler les problèmes de tout le monde, sauf le sien. Il lui faudra donc s'armer de patience avant de, peut-être se voir récompensé.

Pierre Szalowski nous propose de suivre une galerie de personnages qui se révèlent tous plus attachants les uns que les autres : Julie, danseuse dans une boîte de striptease qui enchaîne les relations d'un soir en espérant toujours tomber sur l'homme qui aura l'envie de rester auprès d'elle le matin ; Boris, immigré russe dont les seuls compagnons sont les quatre poissons dont il étudie la trajectoire pour valider sa thèse ; Michel et Simon, un couple discret qui fait tout pour qu'on ne les voie jamais ensemble et pour entretenir la croyance locale selon laquelle ils sont frères ; Alex, le bon ami du narrateur, et son père Alexis, un musicien aigri de n'avoir pu garder ni sa femme, ni sa carrière. Les profils de ses personnages sont sans doute un poil stéréotypés, mais Pierre Szalowski a su leur donner vie d'une telle manière que j'ai eu l'impression de faire moi-même partie du voisinage. 

Le livre est rempli de bons sentiments, les personnages sont tous particulièrement bienveillants, sans doute un peu trop pour être entièrement vraisemblables (Alexis, homophobe et antisémite convaincu, se départi tellement facilement et rapidement de ses préjugés que ça relèverait presque du miracle), mais l'ensemble fonctionne à merveille. J'ai personnellement été très vite embarqué dans ce bon roman feel-good qui ramène un peu de magie dans le quotidien et j'ai quitté à regret les habitant·e·s de cette rue qui forment un groupe relativement disparate mais totalement chaleureux.  

Si l'ouvrage ne nous offre pas, à nous lecteur·rice·s européen·ne·s, un dépaysement complet, on y retrouve l'image d'un Québec froid au climat hivernal qu'on a tendance à garder toute l'année tout en sachant que cette idée préconçue est erronée (en tout cas au mois de juillet).

Le froid modifie la trajectoire des poissons me semblerait être un excellent choix pour une lecture de Noël, entre les visionnages de Maman, j'ai raté l'avion de Chris Colombus et La vie est belle de Frank Capra. Mais, peu importe la période à laquelle vous le lirez, il s'agit assurément d'un livre réconfortant qui saura vous remonter le moral en cas de coup de mou.