Avis #101 : Vers Varsovie : une errance ferroviaire - Joël Schuermans

Ce n'est un secret pour personne, depuis ma rencontre avec le travail des éditions Partis pour  lors du dernier #BelgiqueTerreLittéraire, je n'ai de cesse de vouloir défendre cette maison d'édition spécialisée dans le voyage. Après l'excellent, Biwak, je poursuis mon cheminement dans la collection Errances avec le récit de voyage de Joël Schuermans Vers Varsovie : une errance ferroviaire.

Quand j'ai repris le travail, et donc les trajets en train, lundi dernier, je me suis dit que c'était le moment idéal pour découvrir le récit de l'errance ferroviaire de quatre jours qu'ont entreprise Joël Schuermans et sa compagne de Melreux à Varsovie, en passant par l'Allemagne et la République Tchèque. Lire un récit de voyage en train dans le train me semblait être le meilleur moyen d'entrer en résonance avec les sensations de l'auteur. La vérité, c'est que j'aurais pu le lire de mon lit, mon canapé ou dans un parc et que ça n'aurait rien changé.

D'abord parce que mon expérience du train et celle de Joël Schuermans sont diamétralement opposées. Mon trajet est court et cadré, mes trains sont relativement confortables (et ce malgré la position oblique imposée par les gares de Nessonvaux et Fraipont quand on s'y arrête). L'itinéraire de Joël Schuermans étant basé sur l'errance, il est forcément plus aléatoire. Bien sûr, des correspondances sont prévues, il y a des trains à ne pas rater de préférence, mais l'imprévu est une composante essentielle de la manière de voyager de l'auteur. Aux trains à grande vitesse, il préfère les vieilles machines qui multiplient les arrêts et abritent une population disparate le temps d'un trajet.

« À force de prévenir tout battement, tout imprévu, il finira par ne plus rien arriver, plus rien nous arriver. Une destinée parfaitement réglée, adieu l'aventure. L'ambiance couloir, compartiment, voiture-restaurant, wagon-bar, fenêtres qui s'abaissent sur un quai pour un au revoir ou pour ressentir un paysage en étant caressé par le vent, roulis et vacarme dans les interstices reliant deux voitures sont, et resteront, dans mes souvenirs, étroitement liés au charme des échappées en train. »

J'aurais également pu lire ce livre partout ailleurs que dans le train parce que l'écriture de Joël Schuermans suffit à nous transporter sur les rails. Il rend parfaitement compte de l'inconfort de certaines voitures bondées, de la fatigue physique qui s'accumule à force de courir de quais en quais, d'être balloté de gares en gares, de grappiller quelques heures de sommeil sur un quai froid ou à même le plancher du train. Fatigue qui entraîne le vagabond vers un autre niveau de conscience.

« J'aime cet état qui conduit à un changement de perception de mon environnement. Errer de villes en gares, de gares en trains avive ma sensibilité, me renvoie à la petitesse de nos existences sédentaires confrontées à la grandeur du monde. J'entre petit à petit dans la transe du voyage. Ville-gare-train-carnet-livre-ville-gare-train-carnet-livre-ville-gare-train-carnet-livre... Routine parfois entrecoupée d'une saucisse et d'une bière, d'une clope ou d'un peu de repos, d'un passage aux toilettes, d'une course sur un quai, le cycle se répète machinalement au point d'en avoir le tournis.

Soufies du rail. »

Agrémenté de photographies prises pendant le périple, ce récit se lit avec plaisir et déclenche chez la personne qui le lit une soif de voyages et d'aventures qui ne demande qu'à être étanchée. En attendant de pouvoir le faire, nous pouvons le lire.

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