Avis #90 : Mad - Michaël Lambert

« Il y a deux débuts à cette histoire, comme deux portes à une maison, ce qui n'empêche personne d'entrer par les fenêtres, le soupirail ou la cheminée. Deux débuts car s'il faut commencer quelque part, pour qu'un choix soit possible, il est nécessaire que deux chemins se croisent. Toute vie à plus d'un commencement. Pour Mad, c'est un nouveau départ à cinquante-trois ans. »

Initialement prévu dans ma PAL de la première édition du Belgique Terre Littéraire, Mad, premier roman de Michaël Lambert, est enfin sorti de la liste des livres que je voulais lire ! Après avoir fortement apprécié son court roman Buiten publié au Cactus Inébranlable, il était plus que temps que je découvre un peu plus le travail de l'auteur.

Ce roman paru aux éditions Murmure des soirs m'a finalement beaucoup plu, bien que j'aie eu un peu peur de ne pas rentrer dedans au début. Parce que j'ai éprouvé quelques difficultés à cerner Madeleine dite Mad, peintre de cinquante-trois ans qui décide de tout quitter pour s'isoler dans une maison cachée à l'entrée d'un bois, j'ai bien cru ne pas pouvoir m'y intéresser. Les autres personnages le répètent à quelques reprises, avec une pointe de taquinerie qui trouve son origine dans l'affection qu'ils lui portent : Mad est folle. Parce que Mad n'en fait qu'à sa tête, parce qu'elle préfère se laisser guider par son instinct. Dans un premier temps, j'ai eu un peu de mal avec cette bobo citadine qui se jette dans un retour à la nature qu'elle n'est visiblement pas capable d'affronter. Et je l'ai réellement prise pour une folle dans sa lutte acharnée et obsessionnelle contre les quads que conduisent le jeune homme d'une des deux fermes voisines et ses amis. Mais petit à petit, comme Jean, le fermier de l'autre ferme, je me suis laissé gagner par le caractère volontaire de Mad et j'ai fini par la comprendre un peu dans son besoin de tendre vers une vie plus authentique. Comme Jean  qui, du jour au lendemain, se retrouve seul avec son fils, je me suis laissé emporter par le souffle de vie qui traverse l'artiste. 

Michël Lambert signe avec ce roman un récit qui donne à réfléchir. Si Mad peut nous paraître excessive à de nombreuses reprises, son désir de renouer à l'essentiel va inévitablement interroger notre propre rapport au monde et à notre propre mode de vie. Aurions-nous, nous aussi, le courage de quitter une vie à première vue confortable et remplie de succès si elle cessait de nous convenir ? Serions-nous, nous aussi, capables de nous lancer à corps perdu dans une nouvelle vie à laquelle on ne sait pas si on saura réellement s'adapter ? 

Mad, c'est aussi le roman de Jean qui, après le départ de sa femme Claire, tente de nouer des liens avec Rémi, son fils adolescent. Jean dépense son énergie sans compter pour s'occuper des bêtes de la ferme avec amour et est avare de mots quand il s'agit de communiquer avec son entourage. Père et fils vont tenter de s'apprivoiser, réunis par le travail de la ferme auquel le jeune garçon s'adonne de lui-même pour venir en aide à son père, sans doute, mais surtout pour gagner en maturité, devenir adulte. 

Mad, c'est aussi le roman de rencontres. Rencontre entre Mad et la nature. Rencontre entre Mad et Jean. Rencontre de Mad avec elle-même, de Jean avec lui-même, de Rémi avec lui-même. Les personnages vont s'inspirer les uns les autres, puiser en eux-mêmes et en l'autre de quoi trouver leur place et un nouvel équilibre. Mad va autant chambouler le quotidien de Jean et Rémi qu'eux le sien. Et l'on prend plaisir à découvrir ces relations qui se tissent au fil des saisons. D'un automne à l'autre, une année qui va changer le cours de leurs vies.

Une lecture très agréable qui me rapporte deux points supplémentaires pour le challenge. 

Total : 6 points

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